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En 2014, nous avons lancé le chantier sur l'immobilité urbaine via le texte éponyme, l'Immobile
Il y avait alors cette idée que l'espace urbain se façonne selon le dogme libéral : libre circulation des marchandises et des capitaux, la ville est un flux et rien ne doit entraver les affaires. Jusqu'à supprimer les bancs des places, jusqu'à fabriquer du mobilier urbain « répulsif », jusqu'à implanter des caméras à même de détecter les personnes trop statiques, jusqu'à installer des ultrasons pour chasser les adolescents qui "rouillent" et dont les tympans sont plus sensibles que ceux des adultes.

Puis, il y a eu Charlie Hebdo, le Bataclan, Nice. Et les mesures de sécurité qui ont suivi. Certaines nécessaires. D'autres plus discutables, dont l'efficacité semble surtout résider à couvrir en cas de pépins ceux qui les imposent plutôt qu'à protéger les populations. 
Dans la famille des arts urbains, nous partageons alors chaque jour ce constat : cela devient compliqué, de plus en plus difficile d'appliquer ces mesures toujours plus draconiennes.

Pourtant, dans le même temps, la France accueille la coupe d'Europe de football et ses supporters en liesse, fait défiler son armée le 14 juillet devant une foule immense, organise des obsèques grandioses pour un chanteur populaire devant des dizaines de milliers de personnes.

Se dessine alors une image de la ville animée 'dynamique et fluide' où la transgression, l'étrange, l'altérité sont confinés derrière les barrières Héras. 
Ce que les pionniers des Arts urbains ont acquis au fil de plusieurs décennies pleines d'audaces et de subversions, nous sommes en train de le perdre en une poignée de mois. 

Paradoxe. C'est notre légitimité obtenue qui nous coince. Parce que nous souhaitons maintenir coûte que coûte le lien fragile que nous avons bâti auprès des institutions, prouver encore et toujours que nous sommes des interlocuteurs responsables, ouverts au dialogue, de bon aloi... nous reculons. Jusqu'à quand ?